Mais qu’est-ce qu’une œuvre classée ?
La plupart des gens sont des néophytes dans les arts et encore plus en ce qui a trait au marché très lucratif de ces œuvres. Il y a une différence notable, entre admirer une œuvre dans un musée et lui donner une valeur. Encore plus pour connaître le marché et sa niche commerciale. Plus complexe est la capacité technique de reconnaître un vrai d’un faux. Nous pouvons tous tomber en admiration devant le retable (1) triptyque (2) du Maître de Moulins (3), mais presque personne ne peut lui donner une valeur, mis à part les professionnels du secteur. Une œuvre classée au sens de classique, ce sont les œuvres anciennes ou modernes, déjà entrées dans le patrimoine historique. Sur le marché de l'art classé, comme sur celui de l'art actuel, se négocie des marchandises extrêmement hétérogènes, avec des valeurs, qui vont de quelques dizaines de milliers de dollars à plusieurs centaines de millions. Œuvres de clivage ou de séparation majeure dans le marché de l’art et l'organisation des ventes, qu'il s'agisse des ventes aux enchères ou du commerce privé, se situe deux groupes : les œuvres antérieures à l’impressionnisme d’une part et les œuvres impressionnistes et modernes d’autre part. Le premier est celui de la rareté et de ce qu'on appelle communément, celui du jugement de l'histoire. Elles sont rares, irremplaçables, rarement copiées, sans égal dans l’histoire de l’humanité.
Actifs (4) ?
Cependant, si les œuvres majeures d'artistes qui occupent une position historique de premier rang, constituent des œuvres phares présentant une relative stabilité et pouvant être considérée comme des valeurs financièrement sûres, les facteurs d'incertitude ne sont pas absents du marché de l'art classé. L'évaluation de la valeur artistique est doublée d’une incertitude, celle liée aux caractéristiques spécifiques de l'œuvre et en particulier à son authenticité, et celle qui a trait à l'instabilité sur le moyen ou le long terme de la hiérarchie des valeurs esthétiques. L'œuvre mise en vente, tableau ou sculpture, sera singulière et irremplaçable, elle est indivisible et non substituable. À cet effet originel de rareté, s'adjoignent deux facteurs temporels de raréfaction. D'une part, les œuvres d'art ne sont pas physiquement impérissables. Il est donc impossible de faire le bilan de celles qui ont été perdues, du fait des cataclysmes naturels ou des destructions humaines. Les aléas de la destinée posthume des artistes ont de surcroît diminué les chances de survie de certaines œuvres et pour certains, il est aussi impossible de produire de façon claire, le catalogue complet de leurs œuvres. Il faut compter, enfin, avec le capital artistique gelé dans les musées qui assure la conservation des œuvres et leur mise à disposition du public. En France, par exemple, ces biens font partie du patrimoine national et sont définitivement retirés du marché. Les œuvres sont ainsi protégées des effets de mode, même si, selon les moments, elles disparaissent dans les réserves ou réapparaissent sur les cimaises. L'existence du musée d'Orsay dans sa présentation actuelle, qui revisite l'art pompier (5), témoigne en faveur de cette permanence, même pour les œuvres classées, presque sans valeur actuellement. Plus loin encore, même si l'œuvre classée est entre les mains de particuliers et qu’elle est classée trésor national, il est presque impossible de lui faire quitter la France (6). La situation juridique est différente ailleurs, par exemple, ce n'est pas la même aux États-Unis, où la procédure de l’aliénation (7), autorise la mise en vente, sous certaines conditions, des œuvres appartenant à un musée. En ce qui concerne Singapour, les choses sont très différentes, car le pays est très jeune, possède une superficie extrêmement réduite, ce qui est fait un endroit où les œuvres patrimoniales ne sont pas aussi nombreuses et diversifiées, comme dans les autres nations. Mais le pays possède une solide assise juridique entourant les différents processus d’achats et de ventes, même les rares items patrimoniaux ou les biens au sein des musées (8).
Vecteurs des prix.
Ces biens d'art unique, constituent le type idéal des biens rares dont la différenciation accomplie, confère un monopole, au sens étymologique du terme, à leur détenteur. Qu'il s'agisse ou non d'une vente aux enchères. Le vendeur d'un tableau, est vendeur unique d'un tableau unique. Cependant, il est bien connu que le monopoleur n'est jamais aussi totalement maître du prix qu'il peut le paraître. Des variables relatives à la demande doivent être prises en considération. Par exemple, le revenu des acheteurs potentiels. Le taux de rendement des actions et des obligations, voir les taux d’intérêts (9), la conjoncture économique générale. On admet aussi depuis les travaux de Edward Chamberlin (10), l'existence d'une certaine substituabilité entre des biens, a priori hétérogène, par exemple, un tableau de maître non-substituable à un autre, en tant que tel, peut offrir, en tant que source de prestige ou de valeur refuge, des usages identiques. Il faut saisir que l'unicité de l'œuvre impose une situation de monopole, mais les motivations complexes des acheteurs éventuels, qui n'achète pas toujours l'œuvre unique, mais le symbole social ou le placement solide, réintroduisent au sein du monopole, des éléments concurrentiels. Le degré de substituabilité de l'offre va décroissant, au fur et à mesure qu'on s'approche de l'excellence artistique. Et de la rareté extrême. Dans le marché de la peinture classée où dominent les éléments monopolistiques, on atteint, dans le cas idéal typique de la limitation quasi-absolue de l'offre des sortes de sommets économiques sous conditions, que cette rareté rarissime soit constituée préalablement comme valeur artistique, c'est-à-dire qu'ils soient définis. À la place de l'artiste dans l'histoire de l'art et la place d'une œuvre particulière dans l'œuvre entier de l'artiste, le prix dépend en dernière analyse de la compétition finale entre 2 enchérisseurs, de leur désir de posséder l'œuvre et de leurs moyens d'achat. Il est, en tant que tel, largement imprévisible. Le marché de l'art, classé au niveau le plus élevé, est un marché très étroit, construit sur des réseaux d'informations extrêmement précises et dont l'unité de compte est 1 000 000 US$. Il se situe à l'intérieur de contraintes législatives et réglementaires associées aux différentes politiques nationales de défense du patrimoine. Le commerce reste pour l'essentiel entre les mains de quelques grands marchands de rang international et des maisons de ventes. Les prix atteints, situent la compétition à un niveau mondial. Les principaux acheteurs sont des personnes privées, des institutions et des entreprises, ainsi que des marchands agissant pour eux-mêmes ou en tant qu’intermédiaires. Dans leur majorité, les musées et fondations sont aujourd'hui insuffisamment armés financièrement, pour acquérir les œuvres les plus rares des artistes les plus recherchés. Les directeurs de musées sont très souvent contraints d'opérer des montages financiers impliquant le recours au mécénat. L'identification des œuvres. Le marché de la peinture ancienne porte sur des œuvres qui souvent, ne sont ni datées, ni signées et dont l'identification exige un long travail documentaire. Le marché de la peinture moderne n'est pas, non plus, à l'abri des faux et l'engouement qui entoure certains noms, comme celui de Van Gogh, contribue à les multiplier. Les fausses attributions ne sont pas des faux. Qu'un tableau soit l'œuvre d'un élève tardif de Rembrandt, n'en fait pas un faux et ne modifie pas ses caractéristiques esthétiques, mais porte atteinte à sa place dans l'histoire de l'art, à son appropriation et à son appréciation financière. Subsumer, sous la notion d'attribution, les procédures d'expertise des œuvres classées, se situent dans un cadre de référence unifié. Les experts utilisent plusieurs méthodes d'objectivité, qui ne sont pas identiques, mais complémentaires. Par exemple, analyse technique, stylistique, historique, scientifique, Rayons-X, analyse chimique, etc. Il n'empêche que l'authentification des œuvres, s'élabore à travers des conflits et des coalitions d'acteurs, le travail d'expertise n'étant à l'abri ni d'initiative commerciale compromettant l'indépendance des clercs, ni du bruit des batailles d'experts. Tout changement d'attribution devient un événement monétaire et éventuellement le point de départ d'une procédure judiciaire (11). L'affaire du tableau de Poussins « Olympos et Marsyas » (12) est à cet égard un cas d'école dans le domaine. Elle est exemplaire d'une situation d'asymétrie de l'information entre l'expert, qui avait assisté le commissaire-priseur en 1968 et le conservateur de musée, qui avait préempté le tableau au nom de l'État. Bien des changements d'attribution sont ainsi intervenus, accentuant la rareté des œuvres rarissimes et accroissant la visibilité d'artistes tenu pour secondaire. Les révisions actuelles des catalogues des grands maîtres, font baisser le nombre de leurs œuvres, tandis qu'augmente celui de leurs élèves. Des tableaux oubliés dans les réserves des musées, où nouvellement apparus sur le marché sans auteur désignées au départ, comme attribué à une école ou à un auteur anonyme, pour être affecté finalement à des artistes reconnus, après expertise.
La valeur.
La constitution des valeurs artistiques s'effectue à l'articulation du champ artistique et du marché. Dans le champ artistique, s'opère et se révisent les évaluations esthétiques. Dans le marché, se réalisent les transactions et s'élaborent les prix. Alors qu'ils ont chacun leur propre système de fixation de la valeur, ces 2 réseaux entretiennent des relations d'étroites interdépendance. Trois catégories de biens mobiliers font l'objet d'un négoce sur le marché de l'art. Les œuvres d'art, les objets d'Antiquité et les objets de collection. Concernant les œuvres d'art les plus importantes et l'art contemporain, si tous les marchés artistiques sont des contextes où règnent l'incertitude sur la valeur des œuvres, le marché de l'art contemporain est en effet le lieu de l'incertitude maximale. La difficulté d'analyse des marchés de l'art ne relève pas seulement de la dénégation de l'économie généralisée dans les mondes de l'art. Elle naît de l'incertitude et de l'asymétrie d'information qui caractérise les différents marchés de l'art. L'information incomplète, qui n'est pas identiquement partagée par tous ou accessibles à tous, autorise en effet de multiples manipulations stratégiques, hautement symboliques qui contribuent à la spécificité des marchés artistiques. Seuls, sont bien connus les résultats des ventes publiques (13), mais l'interprétation des prix exige une connaissance subtile du marché. Réservé aux habitués, pour ne pas dire aux initiés. Restons en France. Dans ce pays, le prix payé par un musée français avec de l'argent public, pour l'acquisition d'une œuvre d'un artiste vivant, n'est ni communiqué, ni communicable. La jurisprudence française considère en effet que divulguer ce prix constituerait une atteinte à la vie privée de l'artiste. Les prix en galerie ne sont pas transparents non plus et ouvrent parfois à la négociation. Enfin, une partie des transactions s'effectue dans la clandestinité et les phénomènes inquanlifiables ou invisibles, l'emportent sur les données apparentes et mesurables. Il existe, du fait de l'origine des œuvres et de l'argent, une économie souterraine dont l'importance est difficile à évaluer.
Le segment du marché.
Les œuvres des artistes vivants, constituent une offre pléthorique et hétérogène, à l'intérieur de leur vaste marché. Une première segmentation est imposée par les caractéristiques des œuvres. La frontière la plus évidente et aussi la plus étanche, se situe entre le marché de l'art figuratif traditionnel. Faute de mieux, j’adopterais donc ici (14), la dénomination utilisée par les galeries qui le diffusent : la première catégorie d'œuvres est construite sur une tradition routinisé. Elles alimentent un marché relativement homogène. La seconde catégorie d'œuvres, très diversifiée et très instable, alimente un marché dynamique et fragmenté, subdivisé en de multiples sous-segments. Le premier marché est large et stable, tandis que le deuxième est étroit, évolutif et éphémère et à ce niveau-là, les exemples sont nombreux (15).
La figuration traditionnelle et la souveraineté du consommateur.
L'art contemporain, pour lequel il existe une vaste clientèle et qui alimente la majeure partie des marchés régionaux et locaux de différents pays, n'est pas homologuée par les intellectuels de l'art, qui l'ignorent et les grandes revues d'art n'en font éventuellement mention que dans les pages publicitaires. Ils ne figurent pratiquement pas dans les achats des états, sinon au titre de l'assistance aux artistes en difficulté et à destination des réserves de fonds nationaux si ceux-ci existent. En France et plus largement en occident, le retrait du soutien public, déclenché par Malraux (16), n'a cessé de s'accentuer depuis. Enfin, l'art figuratif traditionnel n'a pas droit d'entrer à la Foire internationale d'art contemporain. Les biens artistiques distribués dans ce segment du marché comportent des caractéristiques communes. Il s'agit de peinture de chevalet, souvent présenté encadré et dans des dimensions autorisant l'usage privé. Les thèmes et la facture des œuvres obéissent à des règles et à des conventions communément acceptées par les producteurs, les distributeurs et les clients. Les arguments de vente portent sur la valeur décorative des œuvres et non sur la valeur de position historique. Ils insistent sur l'excellence du métier dont témoigne le peintre ou le sculpteur, plus que sur le charisme de sa personne. À ce niveau, les valeurs des traditions au travers des différentes écoles, sont opposées à celles de l'internationalisme avant-gardiste. Les galeries consacrées à la figuration traditionnelle dans la sélection qu'elles opèrent des artistes à représenter, exclut la prise de risque associé à l'innovation. Le choix des artistes est effectué en fonction des attentes et des moyens d'achat de la clientèle, soumission à la demande contre la fabrication de la demande, rotation rapide du stock, contre la capitalisation des invendus. Technique ordinaire du marketing, contre mise en œuvre d'un réseau de faire-valoir culturel. Tels sont les principales différences entre les stratégies de gestion des galeries de figuration.
Le label de l’art contemporain.
Les définitions de l'art contemporain ne se réfèrent pas à un critère strictement chronologique et dans sa version internationale et son existence marchande, l'art dit contemporain, ne se confond pas avec la production des artistes vivants. Les spécialistes, historiens, contemporanéistes (17), critique d'art et conservateur, ne dissocient pas la périodisation de la caractérisation esthétique des œuvres. Ils s’entendent plutôt pour situer la naissance de l'art contemporain dans la décennie 1960 1969. Le terme de contemporain, enjeu majeur, est en permanente réévaluation de la concurrence artistique internationale, qui s'est imposé au cours des années 1980. Les compétitions au sein du champ artistique n'avaient plus alors la clarté de 2 camps. Les anciens et les modernes, les figuratifs et les abstraits. Comme dans les années 1950. Elle ne se situait pas non plus dans le secteur restreint des avant-gardes successives des années 1960 et 1970. La fin de la vision téléologique des avant-gardes modernistes (18), a favorisé la substitution du label contemporain à celui d'avant-garde, pour désigner à la fois les créations associées à la tradition moderne de rupture et les créations postmodernes. Nourri de référence à une histoire déconstruite, qui ont ouvert la voie au pluralisme culturel. Les recherches artistiques sont aujourd'hui d'une grande diversité et des labels multiples. On constate des regroupements d'acteurs en réseau qui sont en concurrence les uns avec les autres. Toutes les catégories d'acteurs, artistes, critiquent, marchands, collectionneurs, conservateurs, se retrouvant dans chaque réseau. Face au pluralisme de la scène artistique, le terme d'art actuel est de plus en plus fréquemment substitué à celui d'art contemporain.
Constitution de la valeur des artistes contemporain.
La constitution des valeurs artistiques au double sens esthétique et financier du terme, s'effectue à l'articulation du marché et du champ artistique. La clé de voûte du système est, depuis la fin du dix-neuvième siècle, le marchand entrepreneur, au sens schumpetérien du terme (19). C'est-à-dire, preneur de risque, bailleur de fonds, organisateurs et innovateurs. Dans la mesure où il est l'intermédiaire exclusif entre un Créateur et ses clients potentiels, il est temporairement monopoleur. Les entrepreneurs couramment désignés comme galeristes, se distinguent des négociants qui limitent leurs activités à la revente d'œuvres déjà reconnues. Mais les types mixtes sont plus fréquents que les types purs. Les entrepreneurs n'excluent pas toujours une activité de courtage et la stratégie la plus rationnelle, consiste à conjuguer la diffusion d'artistes consacrés, avec la promotion d'artistes débutants. Les entrepreneurs actuels se distinguent des pères fondateurs de l’industrie, comme l’américain John Dogget et plus proche chronologiquement et géographiquement des européens, M Paul Durand-Ruel, Ambroise Vollard ou Daniel Henry Kahnweiler. En ce qui concerne Singapour, Cheong Soo Pieng, artiste peintre a l’origine, est le précurseur au pays. Tous ces « art dealer », sont non seulement pour un usage différent du temps, mais pour de nouvelles relations avec les artistes. Il faut comprendre que les instances culturelles et le public, c'est l'opposition entre 2 conceptions du marché, l'une fondée sur l'éternité de l'art et l'autre sur le tourbillon innovateur perpétuel, l'opposition entre la stratégie du temps long et des succès différés d'une part, et celle du temps court et du renouvellement continu, d'autre part. Ces nouveaux entrepreneurs, aux États-Unis, ne se situe plus à contre-courant des institutions culturelles, qui se sont ajustées à une esthétique de la contemporanéité et ils disposent de nouvelles clientèles largement soumises à l'opinion des spécialistes nationaux. Le secteur de l'art contemporain se structure autour d'un nombre limité de galeries leaders qui contribue à baliser le territoire artistique mondial et à fixer les tendances dominantes à chaque moment, dans un champ artistique dépourvu d'une esthétique normative. Plusieurs choix sont en effet possibles et la régulation s'opère à travers des conflits entre les grands acteurs culturels et économiques qui dénomment, terrorisent les mouvements et contrôlent l'offre. La galerie leader, une fois qu'elle s'est assurée le monopole d'une tendance, met en œuvre une stratégie de promotion destinée à fabriquer la demande susceptible d'apprécier les nouvelles créations artistiques. Elles combinent les techniques de la promotion commerciale, avec celle de la diffusion culturelle. La probabilité du succès d'un marchand dans l'organisation, en un temps limité d'une stratégie de promotion, dépend du soutien financier dont il dispose et plus encore de sa réputation culturelle, c'est-à-dire de la capacité qu'il a eu dans le passé de faire accepter les nouvelles créations artistiques, par la fraction avancée de l'établissement artistique, c'est-à-dire les collectionneurs influents, les conservateurs de musée, les critiques de grand renom. La galerie leader est en mesure de mobiliser au niveau international un important réseau de galerie. Une coalition informelle de marchands s’entende ainsi pour promouvoir chacun dans sa sphère, une même innovation artistique. Les formules d'entente sont variables et de plus en plus souvent, portent sur des périodes courtes, mobiliser autour de la galerie leader, tous les acteurs économiques et culturels, agissent vite et de concerts, pour que les artistes soient placés partout où il faut, dans les grandes revues, les musées, les collections, les grandes manifestations culturelles internationales.
Fonctionnement de la promotion de l’art contemporain.
La stratégie du temps court dit du « hype » et de la promotion internationale, contribues à la starification d'artistes jeunes, appelés à produire beaucoup pendant la période restreinte de leur lancement. Ce fut notamment le cas de Keith Haring (20). Il existe également une catégorie d'acteurs appelée les mégas collectionneurs, qui collaborent avec les galeries à l'élaboration de la hiérarchie sociale et économique des artistes et des œuvres. Ils sont peu nombreux, très riches, de recrutement international et ils exercent un grand pouvoir sur le marché. Ils achètent un grand nombre d'œuvres, dont plusieurs du même artiste, à un prix relativement faible et en accord avec le ou les marchands promoteurs de l'artiste. Finalement, ils contrôlent l'offre. Il s'agit là d'une collusion inhabituelle entre acheteurs et vendeurs pour restreindre l'offre et faire monter les prix, creusant ainsi la différence entre les artistes du top niveau, dont ils détiennent les œuvres, et le reste du marché. L'entrée dans une grande collection a un effet très positif sur la réputation de l'artiste. De plus, la participation des mégas collectionneurs au Conseil d'administration des grands musées, assure la présence des artistes qu'ils soutiennent dans les institutions culturelles. Les méga collectionneurs ne sont pas des boursicoteurs de l'art. S'ils revendent, c'est en des mains solides. Ils ont en effet le souci constant de ne pas dévaloriser les artistes dont ils possèdent des œuvres, lesquelles constitueront le cas échéant, le fonds d'un musée à leur nom. À la fois acteur culturel et acteur économique, le méga collectionneur joue alternativement tous les rôles, celui de marchand, il achète et éventuellement revend de commissaire d'exposition, de mécènes, donation et fondation. Des exemples : Peter Ludwig, un industriel allemand (21), le comte Panza di biumo (22), homme d'affaires italien, Charles Saatchi publicitaire londonien (23). Les considérations qui précèdent concernent le marché primaire, celui à la source duquel se trouve l'artiste. Les observations effectuées font ressortir le développement et l'anarchie du marché secondaire, celui des reventes. L'art immédiatement contemporain, a pris une place accrue dans les Grandes-Ventes publique internationales. À côté des galeries de promotion, les intermédiaires se sont multipliés. Des marchands négociants, des courtiers et des agents d'art, succèdent dans la chaîne des transactions au marchand entrepreneur. Les ventes aux enchères publiques des œuvres immédiatement contemporaines et la multiplication des foires, facilitent la circulation des œuvres en dehors du contrôle de l'artiste et de son marchand attitré.
Le réseau culturel international.
L'internationalisation du commerce de l'art, contemporain et indissociable de sa promotion culturelle, repose sur l'articulation entre le réseau international des galeries et le réseau international des institutions culturelles. Les transformations du système d'organisation de leur vie artistique, tiennent moins aux transformations du marché. Des musées qui ont été saisis par la fièvre de l'immédiat, en passant par les grandes manifestations internationales comme la Biennale de Venise ou la documenta de Kassel (24), marque les rendez-vous périodiques du monde cosmopolite de l'art international. Elles sont de grands moments de la sociabilité artistique et des lieux privilégiés d'échange de l'information. Les bilans et les perspectives élaborées par les comités d'organisation des biennales ou quadriennales, en faisant le point et en donnant le ton, contribue à la standardisation des choix des collectionneurs et des directeurs de musée. Les artistes eux-mêmes s'y trouvent confrontés à l'image sociale de leurs œuvres, ainsi qu'aux autres courants esthétiques. Ces manifestations exercent aussi, comme les salons parisiens au XVIIIème siècle (25), une fonction de qualification des créateurs. Agissant en tant qu’académie informelle, elle participe à l'élaboration d'un palmarès des valeurs esthétiques et constituent les étapes obligées d'une carrière artistique du double point de vue, de la réputation de l'auteur et du prix des œuvres. Les musées d'art contemporain sont, par l'aura du lieu et l'expertise du conservateur, l'instance majeure de validation de l'art. Le rôle contextuel, écologique et institutionnel du musée d'art contemporain a été souvent souligné. Nombre de créations conçues à l'origine pour contester l'art, le marché et le musée exige, pour être comprises dans la complexité de leur intention, voire pour être perçus comme art, l'accompagnement du commentaire critique et l'effet séparateur du musée. Ce dernier, trace la frontière entre ce qui est l'art et ce qui ne l'est pas ou pas encore. La certification de l'art contemporain ne passe pas comme celle de l'art ancien par le grand privilège de l'attribution, mais par la validation en tant qu’art. Elle porte non pas sur l'authenticité de l'œuvre en tant que rapport à son véritable auteur, mais sur l'authenticité de son existence en tant qu’art. Le directeur de musée engage sa garantie d'abord sur l'identité du bien en tant qu’art a ensuite sur la valeur de l'œuvre.
Conclusion.
Bien que l'art existe depuis le début de l'histoire de l’humanité, il a subi de nombreux changements. Tout au long de la longue histoire de l'art, divers mouvements artistiques ont émergé et avec la naissance de nouveaux mouvements artistiques, des artistes de génie sont nés qui nous montrent un nouveau monde et nous apportent une nouvelle inspiration. Mais la vraie rupture est venue il y a peu encore par rapport à la chronologie humaine. L'art nouveau, à l’aube du XXème siècle, a créé de nouvelles tendances, brisé quelque chose dans l’espace temporelle et traditionnel que l’on se faisait des arts. Mais au niveau du marché, les choses sont plutôt différentes que celle des yeux des artistes. Si certains pensent que les yeux des collectionneurs se tournent vers l'art moderne, cette affirmation est fausse face à l’engouement pour les collections historique. Les collectionneurs qui se rendaient en masse aux foires d'art antique, comme celle de Maastricht aux Pays-Bas, se sont tournés vers l'« Art Basel » suisse, spécialisée dans l'art moderne. Comme je l’ai expliqué, les maisons de ventes aux enchères ont également diffuser des œuvres d’art moderne depuis plus de 70 ans. Le vent de l’art moderne semble être le même en surface. Cela est dû au fait que le flux d’argent et de nouveaux riches a formé un énorme flux centré autour de la zone de distribution de l’art moderne. Mais cela semble plus être une sorte de bulle spéculative. Il faut comprendre que le prix de l’art antique et médiéval est hors de prix, souvent protégé par des législations nationales et internationales et lorsque vendable (dons hors du monopole des musées), aux mains d’une très petite sélection de très riches acheteurs où se mêles fiducie familiale, groupe d’entreprise, milliardaires. Les œuvres dites de la Renaissance, plus accessible si l’on peut dire, sont dans une fourchette de prix tout aussi inaccessible que les précédents et toujours aux mains des mêmes groupes d’acheteurs. Avec l’impressionnisme, les choses changent. Nous avons là, des niches de mode qui commencent à se former, avec un art pompier (académique) dévalué, des artistes oubliés, des œuvres mise de côté, une plus grande production de tableaux avec l’industrialisation des matériaux et l’expansion de leur accessibilité.
EmbunDH.
Référence marché de l’art.
1: https://www.britannica.com/topic/retable
2: https://www.atxfinearts.com/blogs/news/triptych-art-history
4: https://academic.oup.com/raps/article/10/3/490/5716334
5: http://www.dezenovevinte.net/ha/pompier_mgj_fr.htm
8: Treaties, Time Limits and Treasure Trove: The Legal Protection of Cultural Objects in Singapore, 2004, Jack Tsen-Ta Lee, Singapore Academy of Law.
9: https://www.artsy.net/article/artsy-editorial-interest-rates-impact-art-market
10: https://www.jstor.org/stable/1807525
11: de là l’importance de posséder, bien après le fonctionnement du marché des initiés, une solide formation juridique internationale, ainsi que sur les différentes législations en vigueurs, régissant des domaines aussi variés que les articles et codes sur les ventes, droits d’auteurs, protection patrimoniale, assurance et bien d’autre, mais à travers le monde. Il faut aussi posséder un minimum notable d’expertise, dans un des domaines clé du marché des arts dans lequel l’on s’investit professionnellement.
12 : https://www.jstor.org/stable/40766478
13 : les gens s’imaginent souvent que le marché des arts se limite aux ventes aux enchères. Ce qui est faux. Mais certaines œuvres, surtout les plus rares, souvent des antiquités, mais pas uniquement, ne se négocies qu’entre deux entités, de façon privée, avec autour, les mêmes enjeux d’expertises et le même cadre légal, mais sans la forte publicité.
14 : mais d’autre, ayant une bien meilleure expérience que moi, peuvent tout aussi bien avoir une meilleure définition.
16 : Pour en connaitre un peu plus sur ce fabuleux homme qu’était Malraux, voici le site officiel qui tourne autour de sa vie et ses œuvres : https://malraux.org/
Au niveau de ses critiques sur l’art, les livres suivants sont les plus intéressants : Les Voix du silence (1951), j’ai personnellement lu l’édition Gallimard de 1953 et les trois tomes de La Métamorphose des dieux (1957, 1974 et 1976).
17 : https://www.lalanguefrancaise.com/dictionnaire/definition/contemporaneiste
18 : https://modernismmodernity.org/articles/playing-avant-garde
19 : http://www.econlib.org/library/Enc/bios/Schumpeter.html
22 : https://www.nytimes.com/2010/05/02/arts/design/02panza.html
23 : https://www.charlessaatchi.com/
24 : https://www.documenta.de/en/
25 : https://www.worldhistory.org/trans/fr/2-2374/salons-parisiens-et-siecle-des-lumieres/