11 Aug
Singapour et la seconde guerre mondiale.

Si la capitulation de l’Allemagne en 1945 revêt une grande importance en occident, Europe de l’Est et en Afrique, il en est tout autrement pour le reste de l’humanité, en Asie ou la guerre a perdurée encore quatre mois. Ce n’était pas non plus la durée pendant laquelle les hostilités étaient moins nombreuses et moins violentes, bien au contraire. Il est rarement fait état de l’agression japonaise dans l’histoire occidentale et l’imaginaire mondial en dehors de l’Asie. Du théâtre pacifique, les principaux acteurs de l’écriture de l’histoire se bornent en majorité à effleurer le sujet et se concentrent sur trois événements majeurs : Pearl Harbor, Midway et les deux bombes atomiques. Pourtant, l’agression du Japon, son expansion et la violence de son occupation n’ont rien à envier à celle des troupes du troisième Reich (1). Dans un souci de ne pas écorcher le nouvel allié anti-communiste qu’était le Japon « libéré ». Les crimes et violences nippones ont été plus que mis de côté et aucun devoir de mémoire n’a jamais été réellement mis en place au Japon, avec la bienveillance de l’occident. Pas de plan de type dénazification, pas de remise en question de l’impérialisme, pas de jugement de l’empereur et sa famille, etc. Le vide. 

Pour de nombreuses nations asiatiques occupées par les troupes japonaises, un triple sentiment est resté, qui encore aujourd’hui, se sent profondément dans leurs relations avec le Japon (2). 

Le premier c’est qu’il faut bien avouer que sans l’occupation du Japon, le colonialisme occidental serait resté longtemps en place. Le Japon a éveillé pour son propre lobby économie, le nationalisme des pays occupés au sein de son éphémère sphère de coprospérité. Le Japon a démontré, hors de tout doute raisonnable, que l’homme blanc n’était pas invincible, et cela, pour la seconde fois. Déjà en 1905 faces à l’empire Russe (3), mais cette fois-ci, son expansion éclair et sa réussite d’avoir plongé l’ensemble des autres puissances coloniales dans de graves complications stratégiques, dans un court laps de temps, ont brisé à jamais l’idée de toute puissance de l’occident. 

Second sentiment, celui d’apprendre de nos anciens maîtres. Le Japon est sorti du moyen-âge en se modernisant à outrance et s’armant à l’Occidentale (4). Le Japon a appris à respecter le fort pour le copier. Au contraire de l’Afrique qui voie majoritairement l’homme blanc comme uniquement un colonisateur profiteur, nous le voyons plutôt comme un colonisateur aventureux, avec qui nous développons par apprentissage et échange, les outils de notre indépendance et les bases de notre future domination, que nos cultures sclérosées dans l’absurdité disciplinaire, nous imposent. Ceci, encore grâce au Japon. 

Troisième sentiment, celui d’avoir été des victimes du Japon sans avoir vu nos bourreaux être jugés. Car le soldat japonais n’a pas seulement été un occupant, il a aussi été un exploiteur de femmes, un pilleur, un violeur, un massacreur et un xénophobe. 

Rétrospective historique.

Après un brillant bilan tactique suivi de mesures militaire active, les troupes japonaises s’attaquent à la garnison anglaise de Singapour, qui finit par se rendre aux forces japonaises le 15 février 1942 (5). C’est une gifle pour le haut commandement anglais. La même que celle de Corregidor le sera pour celui des USA (6). La lutte a été farouche. Les troupes anglaises et japonaises se sont combattues avec courage. Mais le plus doué l’a emporté. Singapour donnera naissance à ses premiers héros. 

Tout d’abord, le lieutenant Adnan Saidi, un Malais qui mourra avec honneur face aux envahisseurs à qui la Malaisie devra sa devise (7). Une plaque commémorative rappelle l’acte de bravoure de lui et ses hommes au Kent Ridge Park. Singapour est pour les Japonais comme elle l’était pour les Anglais, un endroit géostratégique majeur. 

Le Japon lance donc dans les iles une vaste politique d’assimilation : l’île est rebaptisée en japonais « Syonan » (8), le japonais est obligatoire à l’école, le Kimigayo doit être connu (9), une monnaie propre à Singapour est imprimée, les gens doivent baisser la tête devant des Japonais, le cinéma et la radio diffusent exclusivement des émissions et des œuvres japonaises. Le but est simple. Singapour sera une colonie japonaise. 

Aspet des Japonais conquérants, ils voient les minorités chinoise et indienne comme une cinquième colonne dès le début de son occupation et mettra en place un peu partout en Asie du Sud-est, des mesures vexatoires et de contrôle sur les Peranakans et les Indiens, ces derniers supposés être des éléments pro-anglais par les autorités d’occupation japonaises. Ces politiques discriminatoires et xénophobes portent le nom de « Sook Ching » (10). De nombreux Peranakan (11) mettront ainsi leur vie en danger en rejoignant les réseaux de résistances. Elizabeth Choy (12), une Peranakan, est une de ces héroïnes, victime de la violence japonaise. Membre d’un réseau de résistance avec son époux, qui porte aide et assistance aux prisonniers anglais, elle sera arrêtée, par la Kempeitai (13), torturée et violée pendant 200 jours. Jamais elle ne donnera de nom, ni d’information. Devant son courage et son obstination, le chef de la cellule de la Kempeitai de Singapour, le lieutenant-colonel Masayuki Oishi (14), la fera finalement libérer. Les faits reprochés n’étant pas de nature militaire. Autre héros majeur de Singapour, le policier Halford lovelle Boudewyne (15). Un Eurasien qui au péril de sa vie, prendra des risques inimaginables pour informer les autorités militaires alliés sur les intentions belliqueuses du Japon, sur l’Inde et noter en prenant des preuves, des crimes japonais. 

Conclusion. 

La Seconde Guerre mondiale n’a pas commencé le 9 septembre 1939 pour se terminer le 05 mai 1945. Pour l’Asie, la Seconde Guerre mondiale a commencé le 07 juillet 1937, pour se terminer le 02 septembre 1945. Singapour a été militairement occupé par les Japonais du 15 février 1942, au 12 septembre 1945, date de sa rétrocession aux forces britanniques lors de l'opération Tiderace (16). Mais le mal était fait. Malgré une politique subtile de statut colonial assoupli, le Sud-est asiatique anglait a fini par obtenir l’indépendance.


Embun.


Notes. 

1 : https://en.wikipedia.org/wiki/Japanese_war_crimes 

2 :https://foreigndispatches.typepad.com/dispatches/2005/04/japanbashing_op.html 

3 : https://en.wikipedia.org/wiki/Russo-Japanese_War 

4 : https://afe.easia.columbia.edu/special/japan_1750_meiji.htm 

5 : https://en.wikipedia.org/wiki/Fall_of_Singapore 

6 : https://en.wikipedia.org/wiki/Battle_of_Corregidor 

7 : https://en.wikipedia.org/wiki/Adnan_Saidi 

« Biar putih tulang, jangan putih mata » ou « la mort avant le déshonneur ». 

8 : https://en.wikipedia.org/wiki/Japanese_occupation_of_Singapore 

9 : https://en.wikipedia.org/wiki/Kimigayo 

10 : https://en.wikipedia.org/wiki/Sook_Ching 

11 : https://en.wikipedia.org/wiki/Peranakan_Chinese 

12 : https://en.wikipedia.org/wiki/Elizabeth_Choy 

13 : https://www.nlb.gov.sg/main/article-detail?cmsuuid=5c8c9772-69d9-4554-ae5c-7bfeb6ccd528#:~:text=Within%20the%20same%20year%2C%20the,at%20the%20Stamford%20Road%20Y.M.C.A 

14 : https://en.wikipedia.org/wiki/Kenpeitai_East_District_Branch 

15 : https://en.wikipedia.org/wiki/Halford_Boudewyn 

16 : https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Tiderace

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